INTERVIEW MARC DUVAL


"C'est grâce à mon père si j'ai réussi."


Quoi qu'il arrive, il y a des familles qui seront pour toujours attachées et rattachées à la rascasse, au foot et à la ville de Toulon. Des noms connus et respectés par tous les amoureux du club azur et or. 34 saisons à défendre le maillot du sporting à eux deux, en guise de fidélité, le père et le fils, Marcel et Marc. Joueurs et entraîneurs emblématiques. Personne ne les a oubliés du coté de Bon Rencontre. Gardiens de talents, tous les deux, il est difficile de dissocier leur carrière sur la rade. Aujourd'hui, c'est l'ancien international olympique qui joua quelque 290 matchs avec le maillot frappé de la rascasse que le musée à le plaisir de recevoir: Marc Duval.


MARC, POURQUOI AVOIR CHOISI LE SPORTING ? 

Tout naturellement. Mon père est arrivé à Toulon en 1955, j'avais donc 5 ans et j'ai commencé à jouer dans les équipes de poussins du sporting et je suis monté dans toutes les catégories, jusqu'aux professionnels. Mais j'ai quitté le sporting une saison à 14 ans pour aller jouer aux Routes en cadets. De là, je suis parti une année à Sanary parce que mon père ne voulait pas me laisser au sporting. Il m'avait dit qu'il valait mieux que j'aille jouer dans des équipes "plus faibles", que j'aurais plus de travail qu'au sporting. Parce qu'à l'époque, quand tu étais gardien de but du sporting dans les équipes de jeunes, tu touchais un ballon par mi-temps. Puis, je suis revenu.


QUEL JOUEUR DU SPORTING T'A LE PLUS MARQUÉ ? 

C'est délicat de dire tel ou tel joueur, c'est même impossible. C'est sûr qu'il y a eu de très grands joueurs comme Délio Onnis, des garçons comme Courbis, Christian Dalger. Dalger, c'est lui qui a fait monter le sporting en première division. Il marquait quand il voulait, c'est incroyable. Il pouvait dribbler deux ou trois joueurs et partir marquer tout seul. Saar Boubacar, Alber Emon, Chaussin. Et je ne peux pas ne pas parler de Jean Tigana. Ça a été un très bon joueur... J'en oublie, les Bénédet et compagnie. Martin N'Kouka bien sûr.. Il y en a tellement que c'est très difficile... Balekita, Armando Martin. Excusez-moi  d'oublier les autres, mais il n'y a eu que des bons joueurs. Mais Christian Dalger était un ton au-dessus. J'ai vu des matchs, on perdait 1 à 0, il marquait un but, deux buts... Il marquait quand il avait envie, c'était un phénomène. Et puis, il ne faut pas non plus oublier le médecin du club, le docteur Renzulli.


UN SOUVENIR, UNE ANECDOTE SUR TON PASSAGE A TOULON ?

On était en déplacement, et il y avait à l'époque un président qui avait une chapka qui coûtait une fortune. On était à la gare, on attendait le train, le président pose sa chapka à côté de lui, et là un joueur lui prend la chapka et la jette dans un train à côté... Il doit continuer de la chercher à l'heure qu'il est. Des souvenirs, j'en ai des centaines... Que l'on peut raconter ou pas (rire).

Il y a eu aussi ce match de coupe de France contre St Cyr où l'on se fait éliminer 1 à 0 à Bon Rencontre. Il se dit que trois de nos joueurs avaient été vu dans une boîte de nuit du coin la veille du match (le hi-fi club) jusqu'à deux heures du matin en train de faire la fête. Après, ils ont été transférés. Je ne dirais pas les noms (sourire). Ils se reconnaîtront (rire). Mais çà leur a été bénéfique, ils ont tous les trois été transférés dans des clubs de première division.


UN MATCH EN PARTICULIER ?

Le match de coupe de France contre Monaco à Digne. Il y avait Onnis qui jouait contre nous et on a gagné 1 à 0, c'était un match référence. Un autre, toujours Monaco, mais là-bas. Championnat de France 75/76, je crois. Il reste 2 ou 3 minutes à jouer. Il y avait des Toulonnais et des Monégasques qui quittaient les tribunes, qui partaient. En 3 minutes, on leur a mis 3 buts. C'est l'année où l'on fini champion d'automne devant eux. Et les gens qui sont parti avant la fin du match, quand ils rentraient dans leurs voitures et entendaient à la radio que l'on avait gagné 3 à 0, ils se disaient, c'est pas possible, ils se sont trompés.

Et puis, il y avait ces rencontres contre Marseille, et même si tout se passait bien quand on les jouait en amical, dès qu'on les jouait en coupe, là ce n'était plus pareil. Plus personne ne connaissait personne. Il y avait cette notion de "gagne". Disons qu'il n'y avait pas cette violence dans les tribunes. Quoiqu'à Marseille, je me souviens quand ils ont coincé les Toulonnais, les gars avaient sauté en bas, dans la fosse... Il y a toujours eu cette concurrence...


EN QUELQUES MOTS, SI TU DEVAIS RÉSUMER TON AVENTURE TOULONNAISE?

Ce que j'ai vécu à Toulon, c'est unique, je n'attendais qu'une chose ici : monter en première division. Mon rêve, c'était de faire au moins une année en première division. C'était l'époque du grand St Etienne, Bordeaux, Marseille. Il y avait de grandes équipes. On n'aurait pas pu rivaliser, sur le plan financier, c'était impossible. Un autre club? J'avais l'occasion en 75/76 de partir à Monaco, Marseille, Nancy ou Lille... Mais j'avais trop peur de partir du contexte toulonnais, d'ailleurs, on dit  bien : "qui se lève de Toulon, se lève la raison ". Toulon, c'était une famille, c'était des amis, une bonne ambiance entre nous, les joueurs, mais aussi avec les supporters. C'était un cocon. Il n'y avait pas de rivalité. Ça a changé quand on a flirté avec les années 80, et j'ai même eu de la peur pour mon club. J'étais tellement bien ici à Toulon, que je ne me voyait pas partir. De plus, je jouais en équipe professionnelle, mais j'avais le statut amateur. Je travaillais à la mairie de Toulon. J'étais le seul dans ce cas-là. Je n'ai jamais eu de contrat pro, mais semi-professionnel. Ça m'a été bénéfique d'avoir des amis dans le monde du foot professionnel et dans le monde ouvrier... C'est ce qui permet de garder les pieds sur terre.


QUE DEVIENS-TU ?

Retraité très heureux et pourvu que çà dure...

À la fin de ma carrière, j'ai passé mes diplômes de moniteur de sport, et je me suis retrouvé au service des sports de la ville de Toulon, jusqu'à ma retraite, il y a 4 ans de çà...


ENFIN, UNE PETITE QUESTION UN PEU PLUS PERSONNELLE ,  C'EST PLUS DUR DE REUSSIR AU SPORTING QUAND ON A UN PAPA QUI S'APPELLE MARCEL?

Il y a le pour et le contre... Mais... Je vais dire une chose que je n'ai jamais dite à personne... (le ton de la voix change,  les yeux se remplissent de larmes). Sur son lit de mort, mon père... m'a regardé... et m'a dit " tu m'en veux"... "Pourquoi tu veux que je t'en veuille papa ?"... "Parce que je ne t'ai jamais fait de cadeaux"... Je lui ai dit: "ben, tu as bien fait et tu n'a pas été sévère avec moi"... çà, je ne l'ai jamais dit à personne... çà, çà me reste gravé, çà... C'est grâce à mon père si j'ai réussi, c'est lui qui m'a tout appris, il ne m'a pas lâché... C'est le plus grand cadeau qu'il m'est fait.


Petite note perso : je voudrais juste te remercier Marc pour m'avoir ouvert ta porte si gentiment et de me permettre de partager TON sporting... À bientôt.

Eddie


MARC ET LE SPORTING : 

Gardien de but.

1970/1971: 11 match.

1971/1972:   2 matchs.

1972/1973:   8 matchs.

1973/1974: 37 matchs.

1974/1975: 37 matchs.

1975/1976: 34 matchs.

1976/1977: 35 matchs.

1977/1978: 36 matchs.

1978/1979: 36 matchs.

1979/1980: 17 matchs.

1980/1981: 28 matchs.

1981/1982: 30 matchs.

1982/1983: / 

1983/1984:   1 match.