INTERVIEW HENRI BOROWSKI

 


"Avec Marcel Duval, on jouait sur notre physique."

Ce défenseur aura fait trois montées en première division dans trois clubs différents. L'une d'elles se fera tout naturellement avec le club de la rascasse à l'issue de la saison 1963/1964. Arrivé de sa Lorraine natale où il a tout d'abord travaillé à la mine avant de faire du foot son métier. Il marquera l'histoire du sporting de par sa stature, sa droiture et son talent. Pendant six saisons, il sera la tour de contrôle de cette défense intraitable à Bon Rencontre, mais également loin de ses bases. Aujourd'hui encore, son nom reste vivace dans l'esprit des supporters azur et or les plus anciens. Aujourd'hui, le musée vous propose de passer un moment avec Monsieur Henri Borowski.

Plus personnellement, je voudrais remercier M. Borowski et son épouse pour leur accueil et leur gentillesse.


 HENRI, POURQUOI AVOIR CHOISI LE SPORTING ?

Mon premier club pro était Sochaux. Car avant, j'ai joué à Giraumont et j'ai même été mineur. Je suis venu à Toulon parce que j'avais une blessure à un pied, j'avais une fracture du métatarse. Trois fois la même fracture au même endroit et elle ne se ressoudait pas. Le médecin de Sochaux m'a dit : "il faut que vous partiez dans un club du midi, c'est mieux pour guérir avec le climat." Et c'est comme cela que je suis arrivé au sporting. Lors d'une réunion des clubs professionnels à Monaco, les dirigeants de Sochaux ont discuté avec M. Leterreux et c'est là que ça c'est fait. Sochaux leur a dit :" voilà, on a un joueur qui est disponible, mais qui est blessé", ils ont été francs. Et quand je suis arrivé, ils ont fait une erreur. Ils m'ont passé des examens du genou alors que c'était le pied. Alors, je suis arrivé en étant prêté. Puis Sochaux a voulu me récupérer, mais j'ai dit : "non, je reste à Toulon." Et j'y suis resté six ans. Puis au bout de ces six saisons, il y a eu un changement d'entraîneur et il y a eu un échange entre moi et un joueur de Bastia.


QUEL JOUEUR DU SPORTING VOUS A LE PLUS MARQUÉ ? 

Il y en a eu plusieurs. Surtout des joueurs du cru. D'ailleurs, au moins 50 % de l'effectif étaient des Varois ou des Toulonnais. Il y a eu Francis Blanc : il était très puissant, très rapide. François Simian : il jouait ailier, il débordait, c'était un fameux ailier. Daniel Meggiolaro : très, très grand technicien. Roland Robinet, que l'on surnommait : la mobylette. Puis les entraîneurs : Marcel Duval et Hervé Mirouze. Ils étaient les opposés l'un de l'autre. Avec Marcel Duval, on jouait sur notre physique. On avait une condition physique impeccable. On jouait à fond pendant tout le match. Mirouze, c'était plus la tactique. Plus schématisé, c'était un autre football déjà. Avec Marcel Duval, c'était plus la gagne à tout prix. Avec une grosse pression et on était préparé pour ça. On poussait du début à la fin. Ma préférence allait à Marcel Duval, qui était un gars droit, honnête. On jouait en 4-2-4. On avait une défense rugueuse, dure sur l'homme, mais pas méchant, enfin pour moi (rire). 

Et puis, il faut parler de Garofalo, un très grand gardien de but, que tout le monde prenait pour un fou, mais qui ne l'était pas. Il faisait le spectacle pendant les matchs. Il n'y a qu'avec lui que j'ai vu les spectateurs qui changeaient de tribunes à la mi-temps pour être derrière lui tout le match. Il s'accrochait aux filets et il disait : " M. l'arbitre, les spectateurs me tiennent", ou il montait jusqu'en haut du but par les filets. Il montait jusqu'au centre du terrain. Mais je le répète, c'était un très grand gardien.


UN SOUVENIR, UNE ANECDOTE SUR VOTRE PASSAGE À TOULON ?

Quand on vient de Sochaux avec son climat très très rude et que l'on arrive ici, ça change. La chaleur de Bon Rencontre aussi. C'était chaud comparé à Bonal. Après les matchs, c'était formidable. On se retrouvait les joueurs avec les spectateurs à boire un coup à la buvette de Bon Rencontre. On discutait, il y avait une proximité avec eux.

Et puis, les déplacements en train. On partait le vendredi soir, on voyageait pratiquement toute la nuit. On arrivait le samedi matin, on faisait une bonne sieste. Et on jouait le dimanche après-midi à 15 heures. On repartait le soir en train, toute la nuit.

Et malgré la montée, le club n'était pas structuré pour ça. D'ailleurs, comme quatre ans avant, on n'a fait qu'un an en première division. Les dirigeants, je pense, n'avaient pas la mentalité pour la première division. Sûrement, que cela devait coûter trop cher. Car à part la mairie, c'était eux qui mettaient leur argent personnel. Il n'y avait pas de sponsors comme maintenant.


UN MATCH EN PARTICULIER ?

Un match qui m'a marqué, c'est un match à Mayol contre l'om en championnat. On a gagné un à zéro et c'est moi qui marque le but. À cette époque-là, les arrières centraux ne montaient pas sur les corners, pourtant, j'étais bon de la tête. J'aurais pu marquer davantage de buts si j'avais pu monter. Fallait rester derrière, c'était comme ça à l'époque. Les matchs contre l'om, c'était chaud, très très chaud. Que ça soit sur le terrain ou autour du stade. Les voitures avec les pneus crevés, les pare-brises cassés. Autant à Marseille qu'à Toulon. Marseille, c'était un match de gala. Faut dire que l'on était vraiment la bête noire de l'om. On avait même gagné chez eux.

Le match de barrage pour accéder en première division contre le Racing qui était en première division. On les bat cinq à un à Bon Rencontre. Y'avait des gens de partout, y compris sur les pylônes d'éclairage. On avait perdu trois à zéro là-bas. Le foot, ça marchait bien à Toulon, le stade était plein. Les gars du rugby venaient nous voir et nous, on allait voir le rct.


EN QUELQUES MOTS, SI VOUS DEVIEZ RÉSUMER VOTRE AVENTURE À TOULON :

Déjà, c'est ici que j'ai connu mon épouse qui arrivait de Tunisie. La vie ici avec le soleil. C'était formidable pour moi qui arrivais de Lorraine. L'ambiance à Toulon aussi. Il y avait une très bonne camaraderie, un esprit d'équipe. Les gens nous parlaient dans la rue. Et même encore maintenant, quelques-uns me reconnaissent. C'est pour cela que je suis resté six ans. J'y serai même resté plus, si j'avais pu. D'ailleurs, je suis parti à Bastia puis à Montpellier. Puis j'ai fait ma reconversion sur Avignon, dans l'immobilier et avec mon épouse, nous avons décidé de revenir vivre ici, à Toulon.


QUE DEVENEZ-VOUS ?

J'ai toujours aimé peindre. Alors, tout naturellement, je me suis mis à la peinture. D'ailleurs, la première toile que j'ai peinte, c'est à Bastia. J'avais peint le port de Saint-Florent. Je peins toujours et je fais quelques expositions. J'ai même été invité par le club de Sochaux à exposer à Bonal en 2010.

Quant au sporting, je ne suis plus vraiment le club. Quand on se voit, entre anciens, ça nous fait mal au coeur de voir le club comme cela. Il y a pourtant de la place pour avoir un club, au moins, en ligue 2.

  
HENRI ET LE SPORTING :

Défenseur.

1961/1962 : 32 matchs.

1962/1963 : 28 matchs. 1 but.

1963/1964 : 30 matchs.

1964/1965 : 34 matchs. 1 but.

1965/1966 : 27 matchs. 2 buts.

1966/1967 : 33 matchs. 1 but.