INTERVIEW THIERRY TABERNER


" La première division, tu as ou des bons ou des très bons."


Latéral vaillant, "dur sur l'homme", doué d'une technique supérieure à la moyenne et élégant à voir jouer. Voilà comment ses anciens coéquipiers voyait ce joueur que le musée a rencontré pour notre plaisir.

Recruté par Rolland Courbis en personne, c'est dire la qualité de ce défenseur. Il sera resté deux saisons sur la rade. Deux saisons de la décennie dorée du club de la rascasse.

Aujourd'hui, c'est Thierry Taberner qui partage un moment avec nous.


THIERRY, POURQUOI AVOIR CHOISI LE SPORTING ?

Quand j'avais dix-neuf ans, je jouais à Port-Saint-Louis-du-Rhône et je suis partis à Martigues, pour joueur avec les jeunes, puis avec la réserve et après "pro" où j'ai fait sept saisons en deuxième division.

On a fait un match amical en début de saison contre Toulon et Rolland Courbis, qui était là, m'a demandé si ça m'intéressé de venir signer au sporting. Voilà, ça c'est fait comme ça.

J'étais bien sûr très honoré, très surpris et très heureux. C'était la première division, un autre monde.


QUEL JOUEUR T'A LE PLUS MARQUÉ ?

Tous m'ont marqué, parce qu'il y avait vraiment une ambiance super sympa. Bon après, c'est quand même la première division où chacun défend son territoire. Mais malgré tout, il y avait une super ambiance entretenue par Rolland, par Délio, par tous les gens qui étaient là. C'était génial.

On était sérieux quand on jouait des matchs, mais c'était "bonnard". C'était une autre époque aussi, la fin des années quatre-vingt.

On était tout le temps "fourré" ensemble avec David Ginola, Bernard Pardo, Patrick Vernet, Joel Henry, Paga, Pierre Espanol, Pascal Dupraz. On habitait sur Sanary et on se retrouvait le matin au café, au Mac Sym's sur le port. Avant et après les entraînements. C'était chouette, incroyable.

Mais si j'ai un joueur à citer, je dirais Roger Mendy. Il était vraiment très, très impressionnant. Il avait toutes les qualités requises pour être un très grand joueur : la vitesse, la détente, technique, très décontracté, super gentil avec ses coéquipiers. Je pense que c'est un joueur, s'il jouait maintenant, il jouerait dans les plus grands clubs.

Y en a d'autres, je pense à lui, mais il y en a d'autres. De toute façon la première division, tu as ou des bons ou des très bons.

Paga, qui était un phénomène. David Ginola, qui à son âge promettait énormément. Tous les autres dont on parle moins, mais qui tenaient leurs rôles, comme Carvalho. J'en oublie plein.


UN SOUVENIR, UNE ANECDOTE SUR TON PASSAGE À TOULON ?

Moi ce qui m'a marqué à Toulon, c'est Rolland Courbis. Il m'a fait prendre une autre dimension, m'a fait comprendre la tactique. Je ne parle pas de la tactique où l'on joue en 3-4-3 ou en W (rire). Mais la tactique, celle où il faut anticiper tout le temps. Il y a le ballon qui est là et toi, tu te positionnes par rapport à ton partenaire. C'était très intéressant, parce que tu jouais jamais de la même manière, par rapport à l'équipe que tu rencontrais. Il fallait se mettre au diapason et en même temps, une fois que tu as compris, tu te rendais compte que Rolland était dans le vrai.

Rolland avait cette manière d'être très fortement respecté par ses joueurs, tout en pouvant te faire rire. Tu avais d'autant plus envie de te bouger pour faire partie du groupe, pour être dans ce qu'il préconisait. Pour moi, c'était un honneur d'avoir fait des matchs et d'avoir été coaché par Rolland, car c'est quelqu'un qui comprend très très bien le football et qui l'a fait comprendre à beaucoup de personnes.

Ce n'était pas qu'un meneur d'hommes. C'était un fin tacticien qui réfléchissait beaucoup et quand tu joues et que tu t'aperçois que tu mets en pratique ce qu'il te dit et que ça marche.

Sur mon passage à Toulon, en plus de tout le reste : jouer en première division, les amitiés, c'est vraiment Rolland qui m'a profondément marqué dans mon passage dans le football. Depuis, je regarde le foot avec un oeil différent. C'est quelqu'un qui sait transmettre la passion. C'est un sport d'équipe joué par des individualités qui doivent être au niveau.


UN MATCH EN PARTICULIER ?

Un match qui me vient comme ça. On joue Monaco. Je ne sais plus si c'est à Toulon ou là-bas. En face, il y avait Mark Hateley et Glenn Hoddle. Roland nous dit : "il faut que je tente un coup". Il regarde Roger Mendy et il lui dit : " tu vas jouer stoppeur et libéro en même temps". Roger qui s'occupe des deux et donc, on gagne un mec au milieu pour pouvoir les presser. Il me semble que l'on gagne. Et pendant le match quand je regardais Roger Mendy, ça va vite quand même, c'est la première division. Je me disais, "putain" le mec. Il les a "bouffés" les deux. Sérieux. Impressionnant. Quand il avait le ballon, il t'appelait à droite et sans regarder, il envoyait le ballon à gauche. Il arrivait dans les pieds, il faisait ça en défense. Et après, il rigolait.


EN QUELQUES MOTS, SI TU DEVAIS RÉSUMER TON AVENTURE TOULONNAISE ?

Mon aventure à Toulon, c'était une embellie. J'ai toujours été dans le monde du foot. Mon père a été pro, il a gagné la coupe avec Monaco. J'ai été baigné dans ce monde-là depuis tout petit, mais je n'aurais jamais pensé que j'aurais pu faire ça. Même si c'était un rêve d'enfant. À dix-neuf ans, j'étais encore à Port-Saint-Louis. Mais si tu t'accroches, que tu y crois, tu peux te retrouver à faire des matchs contre Marseille, contre Papin. Je suis fier, je suis content.

En ce qui me concerne, le football m'aura permis de trouver ma voix après, avec l'aide notamment de Pascal Dupraz. J'ai joué à Gaillard, ce qui m'a permis ensuite de travailler aux nations unies depuis trente ans. De faire ma vie là-bas.


QUE DEVIENS-TU ?

Comme je te l'ai dit, je travaille aux nations unies à Genève. Je suis archiviste.


THIERRY ET LE SPORTING :

Défenseur.

1987/1988 : 13 matchs.

1988/1989 : 27 matchs. 1 but.