INTERVIEW BERNARD RODRIGUEZ


"Pas besoin de faire de discours pour nous motiver."


Guerrier : personne spécialisée dans le combat. Homme en état de défendre son clan. Voilà sûrement une définition qui colle à merveille à notre invité du jour. Défenseur repéré puis engagé par Rolland en personne, il aura laissé une trace "douloureuse" à ses adversaires du samedi soir, mais un bon souvenir aux supporters de la rascasse habitués dans l'antre de Mayol aux luttes les plus intenses.

Digne successeur des Lardeyret, Boissier ou autre remparts azur et or, il aura vendu chèrement ses couleurs tout au long des deux saisons passées au bord de la rade.

Aujourd'hui, c'est avec Bernard Rodriguez que le musée vous propose de passer un moment. 


BERNARD, POURQUOI AVOIR CHOISI LE SPORTING ?

Je jouais à Sète et le club a déposé le bilan. Rolland est venu me chercher en me disant que je ne serais pas titulaire, mais que si je prouvais que je méritais de jouer, je serais titulaire. Il était le boss et j'ai accepté. J'ai su après qu'il me suivait depuis un petit moment et qu'il voulait que je vienne avant.

J'ai signé pour quatre saisons et j'ai fait une première belle année où j'ai pas mal joué, puis je me suis blessé la saison d'après et j'ai naturellement moins joué. Quand Rolland s'est retrouvé en prison, il est remplacé par Délio, puis Guy David, avec qui je suis devenu intime. Et quand Pierre Mosca est arrivé à son tour, cela ne s'est pas très bien passé et j'ai décidé, d'abord de partir, puis d'arrêter ma carrière. On avait Rolland qui gérait son effectif avec des relations humaines très fortes et Pierre Mosca, dont l'approche était plus "militaire".


QUEL JOUEUR T'A LE PLUS MARQUÉ ?

j'ai eu la chance de côtoyer pas mal de joueurs à Toulon. Je dirais peut-être Peter Bosz. Humainement, il y a eu Luc Borrelli. On était devenu de vrais amis.

Mais avant tout, à Toulon, c'est le groupe qui ressort. On était une bande de potes. Pas besoin de nous dire qu'il fallait que l'on se batte pour l'autre, que l'on court pour l'autre. Pas besoin de faire de discours pour nous motiver. On était une famille, une famille avec du caractère et du tempérament avec les Alfano, Meyrieu, Rabat et j'en passe. On pensait au collectif avant de penser à nous. On savait ce que l'on avait à faire.


UN SOUVENIR, UNE ANECDOTE SUR TON PASSAGE À TOULON ?

Pour être dans la continuité de ce que je viens de te dire. Quand Pierre Mosca arrive, on part en stage au Touquet. Sportivement, il ne comptait pas prendre François Zahoui pour ce stage. Au départ du bus, on est tous descendu à attendre qu'il parte avec nous. Voilà l'état d'esprit qui nous animait.

Et puis on peut en parler, il y a prescription maintenant. Le match contre Rennes et mon match avec Moussa Traoré. Il avait passé tout le match à m'insulter, à me chercher, à me traiter de tout. Faut dire que je l'avais un peu chargé aussi physiquement. Et à la fin du match, en sortant du stade, je le vois dans le bus des joueurs de Rennes. Je m'approche et je lui dis : " viens me répéter ce que tu m'as dit tout le match", et quand il sort du bus, je lui mets un coup de casque. Aussitôt, imagines, les mecs de Rennes, descendent du bus, le scandale. Ils portent plainte et me voilà convoqué chez les policiers, au commissariat de Toulon avec deux témoins :  Fred Meyrieu et Patrice Marquet, il me semble. Là, les policiers, supporters du sporting, me disent : " attends, on va arranger le coup, on va dire qu'il a voulu te mettre un coup de poing et qu'en l'évitant, tu as baissé la tête et tu t'es cogné contre lui". Tu parles, je lui avais pété le nez...(rire). Mais il n'y a pas eu de suite. Par contre, je ne te raconte pas le match retour.(rire).


UN MATCH EN PARTICULIER ?

Mon premier match en première division, à Monaco. Rolland m'avait demandé de prendre Rui Barros. On avait perdu, mais j'avais fait un bon match.

À Mayol contre Nantes aussi. Rolland venait d'être incarcéré et comme les matchs étaient retransmis à la radio, on est rentré avec quelques minutes de retard sur la pelouse pour montrer qu'on pensait à lui.

Contre Auxerre, à Toulon, aussi. Ce soir-là, on perdait trois à zéro et on revient trois à trois, dans un stade en feu. Mayol était réputé être chaud, Guy Roux doit s'en souvenir encore.


EN QUELQUES MOTS, SI TU DEVAIS RÉSUMER TON AVENTURE TOULONNAISE ?

La découverte de la première division et aussi et surtout l'aventure humaine. À la fin de ta carrière, tu ne te souviens plus des primes que tu as touchées, mais des aventures humaines que tu as vécu et de ce que tu as fait avec les autres. Quand Luc Borrelli est mort, il ne manquait pas un joueur à son enterrement. Ça résume tout ce qu'était le sporting. On faisait passer les autres avant nous.


QUE DEVIENS-TU ?

À la fin de ma carrière, j'ai passé tous les diplômes et je suis devenu entraîneur dans pas mal de clubs de la région. J'ai même été contacté il y a quelque temps pour venir au sporting. Sans suite. Avec José Anigo, on est parti entraîner au Maroc. Puis j'ai même fait une pige avec l'équipe nationale de Mauritanie et là, je suis en Arabie Saoudite. Je travaille à la DTN, je suis en charge de l'équipe nationale des U15. Il y a un grand projet là-bas. Ce qui se passe aujourd'hui avec les transferts de grands joueurs n'est qu'une partie du projet, c'est la vitrine. Le projet est porté par Nasser Larguet. Il doit faire ici, ce qu'il a fait avec le Maroc.


BERNARD ET LE SPORTING :

Défenseur.

1990/1991 : 28 matchs.

1991/1992 :  7 matchs.